Histoire
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  • Francois-Xavier Ada

Koukourou, Province du Borkou – En parcourant ses champs d'oignons, d'ail et d'hibiscus, Ngala est une femme comblée.

« Notre vie d'aujourd'hui ne peuvent être comparée à celle d'hier », dit-elle en brandissant une nouvelle récolte d'ail. « Tout est mieux maintenant ! »

Lorsque son mari est décédé en 2008, Ngala a pris en charge la parcelle familiale. Bien que l'héritage ait été transmis à ses fils selon les coutumes locales, ils ont fait confiance à ses mains expertes pour faire fructifier la terre.

Un employé de l'OIM tient un tuyau d'eau alimentant un canal d'irrigation creusé par les agriculteurs suite à l'installation du système solaire. Photo : OIM/Andrea Ruffini 2021

Mais cette mère de deux enfants s’est trouvée confrontée à un défi de taille : l'irrigation.

Koukourou, sa communauté d’origine située dans la province tchadienne du Borkou, ne disposait que d'un seul point d'eau, partagé avec de nombreux autres agriculteurs. Pour garantir l'accès de tous à l'eau, la communauté avait décidé de rationner l'utilisation de cette précieuse ressource. Les agriculteurs faisaient des réserves à tour de rôle, ce qui garantissait l'égalité d'accès et réduisait les risques de conflit.

« Notre tour venait le dimanche et nous ne pouvions remplir que 10 seaux d'eau pour le jardin chaque semaine », se souvient Ngala. « Nous savions que notre jardin avait du potentiel, mais notre problème était l'eau ».

Ngala (à droite) et les femmes de sa coopérative posent dans le jardin de Koukourou. Vingt femmes forment la coopérative qui exploite le jardin. Photo : OIM/François-Xavier Ada 2023

Comme Ngala, des centaines d'agriculteurs des régions arides du nord du Tchad ont des problèmes d'accès à l'eau potable et à l'eau agricole, malgré d'importantes ressources souterraines et de surface.

« Bien que l'eau soit disponible, elle est souterraine et les agriculteurs ont des capacités financières et techniques limitées pour creuser des puits suffisamment profonds et pomper l'eau à des fins d'irrigation », explique Alassane Dembele, responsable du programme de consolidation de la paix de l'OIM dans le nord du Tchad. Ainsi, poursuit-il, « la productivité agricole est conditionnée par la variabilité des précipitations, et les moyens de subsistance restent fragiles et vulnérables aux chocs climatiques ».

Dans le cadre des initiatives de consolidation de la paix et de stabilisation des communautés dans le nord du Tchad, l'OIM soutient les petits exploitants agricoles et les jardins communautaires en les dotant d'un système d'irrigation afin de stimuler la productivité agricole et de permettre aux agriculteurs de la communauté de devenir plus résilients.

Ngala, une agricultrice de Faya, a bénéficié de l'initiative des jardins communautaires de l'OIM dans le nord du Tchad, qui comprend l'intensification de l'irrigation pour améliorer la productivité agricole. Photo : OIM/François-Xavier Ada 2023

« Dans les communautés ciblées, et en fonction des besoins exprimés par les membres de la communauté, nous fournissons un soutien pour intensifier l'irrigation, qui peut aller de la construction d'un point d'eau lorsque l'accès à l'eau de surface est facile, au forage d'un puits ou à l'installation d'un système d'irrigation à énergie solaire lorsque l'eau est plus profonde », explique Alassane Dembele de l'OIM.

A Koukourou, Ngala et ses fils ont réussi à creuser un puits mais ne parvenaient pas à pomper suffisamment d'eau pour irriguer le vaste jardin. En partenariat avec le Centre local de formation technique et professionnelle, qui reçoit également le soutien de l'OIM, 12 panneaux solaires ont été installés dans le jardin de Koukourou pour alimenter les canaux d'irrigation.

Pour Ngala et sa famille, cela a changé la donne. Grâce au débit actuel, ils peuvent désormais cultiver plus de terres et produire une plus grande variété de légumes. Ngala a décidé de s'associer à des femmes voisines et, ensemble, elles ont créé une coopérative agricole avec suffisamment de bras pour couvrir l'ensemble de la parcelle de terre.

Ngala et son premier fils, qui a hérité du jardin et le lui a confié. Photo : OIM/François-Xavier Ada 2023

« Notre production a changé. Grâce à cette eau, on voit que tout est vert. Nous avons des carottes, des betteraves, des oignons, des salades, tout ! », s’exclame-t-elle. Nous vendons régulièrement nos produits au grand marché ainsi qu'à de plus petits revendeurs, puis nous utilisons les bénéfices pour réinvestir dans l'achat de nouvelles graines à semer ».

Au-delà des avantages économiques, le « nouveau jardin de Koukourou » a permis à Ngala et aux agriculteurs voisins de devenir autonomes.

« Avant, nous dépendions de nos maris pour chaque dépense que nous voulions engager, mais maintenant, ce n'est plus le cas », explique Hawa, membre de la coopérative. « Avec ce que nous gagnons ici, nous pouvons envoyer nos enfants à l'école, payer nos factures médicales et d'autres dépenses personnelles sans leur demander quoi que ce soit, et tout le monde est content », ajoute-t-elle.

Dans les provinces du Borkou, de l'Ennedi-Ouest et du Tibesti, l'OIM soutient des microprojets d'irrigation dans 19 communautés, bénéficiant à plus de 20 000 personnes, grâce à des financements de la République fédérale d'Allemagne, du Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix, du Japon et de la Suisse.

SDG 6 - EAU PROPRE ET ASSAINISSEMENT
SDG 8 - TRAVAIL DÉCENT ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
SDG 10 - INÉGALITÉS RÉDUITES